Soundes Gragueb Chatti, (Chargée de Recherches- Kairouan)
La céramique glaçurée de Raqqada
Un travail de catalogage pour la céramique glaçurée du site de Raqqada a été entamé, avec l’appui bienveillant de M. Fathi Bahri. Il s’agit d’une céramique issue des fouilles réalisées au cours des années 60 et d’autres des années 80 qu’on a pas eu l’occasion d’étudier au cours de notre thèse et dont le matériel révèle des morphologies et des motifs décoratifs qui nous sont inconnus jusqu’à ce jour. Ainsi que quelques pièces tardives différentes des productions connues du site de Raqqada, relevant du Xe siècle. Ces collections témoignent de la vie quotidienne sur ce site de référence.
Cet inventaire sera complété par une étude typologique et chronologique du matériel médiéval découvert sur ce site de référence. Ainsi qu’une étude portant sur la composition des glaçures et si possible mener des comparaisons avec d’autres sites.
![]() Un fragment de fond d’une grande coupe avec une composition décorative à base d’étoiles à six branches |
![]() Une coupelle à composition florale |
![]() Un fond de coupe avec comme décor un quadrillage à cases bipartites |
![]() Un volatile stylisé occupe le champ décoratif d’une coupelle |
Présence antique dans la ville de Kairouan : Témoignages archéologiques et perspectives de recherches
J’ai rédigé avec mon collègue Taha Khechine un article intitulé « Présence antique dans la ville de Kairouan : Témoignages archéologiques et perspectives de recherches ». Cette étude est le résultat d’un sondage, réalisé dans un terrain non loin de la Grande Mosquée (distant de 150 m de la Grande Mosquée), qui a permis de dégager des phases d’occupation s’étalant depuis l’antiquité tardive jusqu’à l’époque moderne. L’occupation antique est marquée par une fosse de décharge, riche en céramique antique. De plus la fouille a mis au jour un four à usage métallurgique datant du VIIIe siècle et qui a été abandonné au IXe siècle au profit d’espaces privés. Le matériel céramique illustre un témoignage probant d’une occupation antique au voisinage de la Grande Mosquée.
Le corpus se compose d’un total de 813 tessons dont 112 vases. Les amphores et les céramiques communes comptent à elles-seules 530 fragments soit 72 % de l’ensemble de la céramique étudiée contre 38 % pour les autres catégories de la céramique.
Il est intéressant de noter la faible proportion de céramique sigillée qui ne représente que 8% du matériel, ainsi que celle de la céramique culinaire africaine qui n’atteint que 7% du total des individus. La majorité du corpus est donc représentée par des céramiques communes calcaires ; les céramiques de transport et stockage constituent près d’un tiers des individus.
Dans l’étude que nous avons consacrée au matériel céramique, ont été examinées successivement : les typologies de la céramique sigillée, la céramique culinaire, la céramique modelée, la vaisselle commune, les amphores et les amphorettes, et enfin la céramique peinte et les lampes. Nous avons abordé vers la fin la problématique de la présence d’un groupe de céramique qui remonterait probablement à la période charnière c’est-à-dire au VIIIe siècle datée en grande partie grâce à des pièces de monnaies trouvées dans des nivaux scellés.
![]() Un col d’une amphore type Keay 34 (première moitié VIIe siècle) |
![]() Une lampe (fin du VIe s. -la première moitié du VIIe siècle). |
Exposition sur la céramique nasride
Dans le cadre d’une exposition sur la céramique nasride (XIIIe- fin XVe siècle), qui se tiendra entre le mois de décembre et le mois de mars prochain dans la ville de Grenade en Espagne, les organisateurs de cette exposition ont adressé un courrier à l’Institut National du Patrimoine pour l’emprunt des pièces de céramique tunisienne conservées ou exposées dans les musées tunisiens.
Nous avons effectué un choix des pièces à exposer pour marquer la contribution tunisienne à cette exposition, tout en rédigeant un rapport pour expliquer notre sélection d’objets. A travers les pièces choisies on a essayé de démontrer que du point de vue stylistique il semble que le répertoire de certains décors nasrides, est toujours dans la continuité du répertoire apparu à la fin du Xe siècle en Andalousie, parvenus par le bais de l’Ifriqiya. Les représentations féminines, l’antilope …, le volatile étalant ses ailes, l’étoile à six branches…. apparues trois siècles, plus tôt sont toujours utilisées à l’époque nasride (XIIIe- XVe siècle) sous d’autres expressions.
Certains décors de la céramique nasride semblent trouver leur origine dans un substrat ifriqiyen. En outre, certains auteurs pensent que la technique du lustre métallique très répandue sur la céramique nasride aurait été implantée en al-Andalus via le Maghreb, vraisemblablement de Tunis.
Ces échanges culturels entre l’Ifriqiya et l’Andalousie aussi bien dans un sens que dans l’autre s’expliquent par des transferts, de techniques, de matières premières, de savoir-faire ou de main d’œuvre.
D’un autre côté plusieurs représentations décoratives figurant sur la céramique hafside seraient à rapprocher du répertoire stylistique hispano- andalou. Avec la prise du pouvoir par les hafsides vers la fin du XIIe siècle, il semble que l’on change d’aire d’influence. Il serait vraisemblable que les influences orientales laissent la place à d’autres régions notamment l’Andalousie où des ressemblances très remarquables sont relevées entre le vaisselier ifriqiyen et le mobilier andalous de la fin XIIe et du XIVe siècle.
Les pièces et vaisselles de ce nouveau corpus sont remarquables par la domination du bleu de cobalt et le brun de manganèse sur un fond blanc laiteux, et le recours à un répertoire décoratif original, où domine l’abstraction géométrique, notamment le motif étoilé…. Ces objets sont très largement inspirés du répertoire hispano-andalou.
![]() La dame de Sabra » (deuxième moitié du Xe siècle- Première moitié du XIe siècle) |
![]() Coupe à l’antilope (deuxième moitié du Xe siècle- Première moitié du XIe siècle) (D’après Louhichi 2010, Céramique islamique de Tunisie, Ecole de Kairouan-Ecole de Tunis, p.74) |
![]() Un motif étoilé qui se dégage d’un polygone (XIVe- XVe siècle) (D’après Louhichi 2010, Céramique islamique de Tunisie, Ecole de Kairouan-Ecole de Tunis, p.138) |
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